« Nous ne pouvons pas arrêter seuls l'offensive israélienne, mais nous n'aurons de cesse d'essayer », a déclaré le Premier ministre Pedro Sánchez.
Source : Truthout, Brett Wilkins, CommonDreams
Traduit par les lecteurs du site Les-Crises

Carlos Lujan / Europa Press via Getty Images
Le Premier ministre espagnol Pedro Sánchez a annoncé lundi une série de neuf nouvelles mesures, dont un embargo total sur les armes, visant à faire pression sur le gouvernement du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou « pour qu'il mette fin au génocide à Gaza. »
Sánchez, qui dirige le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), a annoncé ces mesures lors d'un discours au cours duquel il a commencé par reconnaître les souffrances historiques du peuple juif, notamment le nettoyage ethnique des Juifs d'Espagne en 1492.
« Le peuple juif a subi d'innombrables persécutions, il mérite d'obtenir son propre État et de se sentir en sécurité » a déclaré Sánchez. « C'est pourquoi le gouvernement espagnol condamne les attaques du Hamas depuis le tout premier jour. »
Cependant, « il y a une différence entre défendre son pays et bombarder des hôpitaux ou affamer des enfants innocents » a poursuivi le Premier ministre. « Il s'agit d'une attaque injustifiable contre la population civile, que la rapporteure [des Nations unies] a qualifiée de génocide. »
« Soixante mille morts, deux millions de personnes déplacées, dont la moitié sont des enfants » a déclaré Sánchez. « Il ne s'agit pas ici de légitime défense, ce n'est même pas une attaque, c'est l'extermination d'un peuple sans défense et une violation de toutes les lois internationales. »
Les neuf mesures, qui doivent être approuvées par les législateurs et le Cabinet, comprennent :
- Une « interdiction légale et permanente » de tout achat et vente d'armes, de munitions et d'équipements militaires ;
- Une interdiction de transit par les ports espagnols pour tous les navires transportant des carburants destinés à l'armée israélienne ;
- Le refus d'entrée dans l'espace aérien espagnol pour tous les avions d'État transportant des équipements militaires vers Israël ;
- Une interdiction d'entrée en Espagne pour « toutes les personnes directement impliquées dans le génocide, les violations des droits humains et les crimes de guerre » à Gaza ;
- L'interdiction des produits importés provenant des colonies illégales dans les territoires palestiniens occupés ;
- La limitation des services consulaires pour les citoyens espagnols résidant dans les colonies israéliennes illégales ;
- Le renforcement du soutien à l'Autorité palestinienne ;
- Une aide complémentaire de 10 millions d'euros à l'Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) ;
- Une augmentation des dépenses humanitaires globales pour Gaza, qui atteindront 150 millions d'euros d'ici 2026.
« L'Espagne ne dispose pas de bombes nucléaires. Nous ne pouvons pas arrêter seuls l'offensive israélienne, mais nous n'aurons de cesse d'essayer », a déclaré Sánchez, reconnaissant les limites de l'action menée lundi.
Les nouvelles mesures prises par l'Espagne s'ajoutent à celles déjà adoptées en faveur d'un embargo sur les armes, au soutien de plusieurs résolutions de l'ONU sur le cessez-le-feu, au soutien apporté à la Cour pénale internationale (CPI) dans ses efforts pour traduire Netanyahou en justice, à la procédure engagée devant la Cour internationale de justice (CIJ) par l'Afrique du Sud contre Israël pour génocide, et à la reconnaissance officielle de l'État palestinien.
Certains responsables politiques espagnols ont également pris des mesures en faveur de la Palestine, notamment l'ancienne ministre des Droits sociaux Ione Belarra, l'une des premières à avoir soutenu les poursuites à l'encontre de Netanyahou et d'autres devant la CPI ; l'ancienne députée de gauche et conseillère municipale de Palma Lucia Muñoz, qui a participé à la flottille Global Sumud ; et l'ancienne maire de Barcelone Ada Colau, autre membre de la flottille, dont la ville a rompu toute relation avec Israël avant le génocide de Gaza pour « crime d'apartheid contre le peuple palestinien. »
La Flottille mondiale Sumud, dont les autres membres comprennent Mandla Mandela, Susan Sarandon et la militante suédoise pour le climat Greta Thunberg, a quitté Barcelone le mois dernier et a été chaleureusement accueillie dimanche lors d'une escale à Tunis, en Tunisie, alors qu'elle se dirigeait vers la côte de Gaza, les militants tenteront alors de briser le blocus israélien et de livrer l'aide humanitaire dont la population a désespérément besoin.
Le gouvernement israélien a répondu à l'annonce de Sánchez par son accusation habituelle d'antisémitisme et par une interdiction d'entrée sur le territoire pour la vice-Première ministre Yolanda Díaz et la ministre de la Jeunesse Sira Rego.
« Je suis fière qu'un État génocidaire m'interdise d'entrer sur son territoire », a déclaré Díaz, membre du Parti communiste espagnol et du mouvement Sumar.
L'Espagne a ensuite rappelé son ambassadeur à Tel Aviv. Le ministère espagnol des Affaires étrangères a déclaré que le gouvernement « ne se laisserait pas intimider dans sa défense de la paix, du droit international et des droits humains ».
Selon les chiffres du ministère de la Santé de Gaza - que les experts estiment largement sous-estimés - au moins 64 522 Palestiniens ont été tués par les forces israéliennes à Gaza depuis octobre 2023, dont la plupart sont des femmes et des enfants. Plus de 163 000 autres ont été blessés, et des milliers d'autres sont portés disparus et présumés morts, ensevelis sous les décombres.
Des centaines de milliers d'habitants de Gaza meurent de faim dans une famine largement causée par le « siège intégral » imposé par Israël à cette enclave côtière. Plusieurs centaines de Palestiniens au moins sont morts de faim dans ce que les experts en matière de famine et tous les membres du Conseil de sécurité des Nations unies, à l'exception des États-Unis, ont qualifié de catastrophe d'origine humaine causée par les politiques et les pratiques israéliennes.
Les mandats d'arrêt délivrés l'année dernière par la CPI à l'encontre de Netanyahou et de l'ancien ministre israélien de la Défense Yoav Gallant les accusent de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre, notamment de famine forcée et de meurtre.
Lundi, l'Espagne a également condamné ce qu'elle a qualifié « d'attaque terroriste » qui a fait six morts, dont le citoyen espagnol Yakov Pinto, lors d'une fusillade de masse au nord de Jérusalem occupée.
L'annonce de Sánchez fait suite à des manifestations pro-palestiniennes et anti-génocide dans plusieurs villes, dont la capitale Madrid, où des manifestants se sont rassemblés samedi devant l'ambassade d'Israël et ont scandé des slogans tels que « Ceci n'est pas une guerre, c'est un génocide ! » et « Israël tue, l'Europe sponsorise ! »
Dimanche, les manifestants se sont rassemblés sur la place Callao à Madrid, et les participants ont lu à haute voix les noms de nombreux enfants palestiniens parmi les plus de 18 500 tués par les forces israéliennes à Gaza, chacun suivi du mot « assassiné. »
Selon un sondage réalisé en juin par le Pew Research Center, 75 % des Espagnols interrogés ont une opinion négative d'Israël, 46 % d'entre eux - le pourcentage le plus élevé parmi les 24 pays non musulmans sondés - ayant une opinion « très défavorable » du pays.
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Brett Wilkins est rédacteur pour Common Dreams.
Source : Truthout, Brett Wilkins, CommonDreams, 08-09-2025
Traduit par les lecteurs du site Les-Crises